Pro/Amateur

Provocation?

Ne vous précipitez pas vers les commentaires pour me dire que ce qu’il y a dans l’image au dessus est stupide.

C’est une provocation de ma part et de FEARLESSPHOTOGRAPHERS, association de photographes de mariages à laquelle j’appartiens.

Est-ce que j’adhère à tout ce que suggère ce message? Non. Est-ce que je rejette tout ce qu’il suggère? Non plus.

Commençons par le plus simple:

  • il existe des photos merveilleuses d’amateurs
  • il existe des photos odieuses de professionnels

Les difficultés commencent quand on généralise ces deux banalités ou bien qu’on prend leur contrepied à 100% comme si les amateurs ne faisaient que des photos pourries et les professionnels des photos splendides.

Alors, quel est mon point de vue sur le sujet?

La pratique

Pour les mariages, la différence majeure entre pro et amateur est la pratique et la prévision de ce qui risque de se passer.

Prévoir que la mariée va craquer de bonheur (le plus souvent, chouette!) ou craquer parce que sa maman déteste son maquillage et le lui dit (vécu) ou que sa belle mère a passé toute la cérémonie un smartphone devant le visage (moins drôle et aussi vécu), ou parce qu’une ex de son mari a été invitée a son insu (oops, aussi vécu), cela ne peut s’apprendre que par la pratique. Et ce n’est pas en faisant 2 mariages par an que cela s’acquiert.

Cette maman n’a versé qu’une seule larme après que son fils ainé se soit marié, il fallait le prévoir, y être et se positionner rapidement de manière à ne pas avoir des chaise vides ou une porte en arrière plan.

Toutes proportions gardées, c’est un peu comme les médecins urgentistes qui ont un diagnostic, à mon avis, beaucoup plus affuté, simplement parce qu’ils ont vu passer un nombre  gigantesque de cas et de pathologies.

C’est le premier sens que je donne à « everything is going wrong » dans le slogan de FEARLESSPHOTOGRAPHERS, et non pas des aspects techniques comme une mauvaise lumière ou un contre-jour difficile comme le croient beaucoup d’amateurs quand on leur parle de « choses qui ne vont pas ».

L’amateur va peut-être penser technique quand le pro va penser « moments de vie », retards,  crispations, mauvaises humeurs des uns ou des autres.

Le prix

Nous vivons dans un pays pauvre. Ce n’est pas moi qui le dit, c’est l’INSEE avec plus de 9 millions de personnes en dessous du seuil de pauvreté.

Alors quand un « amateur » propose de rendre, en apparence, le même service pour quelques centaines d’euros quand je demande 1700€ (tarif octobre 2018), il est plus que normal qu’il y ait des clients à ces prix cassés!!

J’ai longtemps pensé que ce n’était pas bien grave pour moi: les mariés qui paient leur photographe 200€ n’auraient jamais pu devenir mes clients de toutes façons, et ce n’est donc pas une concurrence.

Je le pense toujours. Mais il est apparu un effet de bord de ces prix cassés, très désagréable, qui m’est arrivé en pleine tête l’année dernière quand je faisais une petite campagne de publicité sur Facebook. Je cite: « non, mais pour qui vous vous prenez pour demander une telle somme pour faire des photos?!! »

Avoir à justifier ses tarifs est très désagréable, et quelqu’un qui vous pose la question ne vas de toutes façons jamais devenir votre client. Je réponds donc ici, indirectement, à tous ces experts du « juste prix ».

Un professionnel a au moins un boitier photo de secours au cas où, et forcément plusieurs objectifs au cas où. Le matériel que j’utilise en mariage à un coût d’environ 25000€, trois boitiers professionnels, 3 zooms professionnels et 3 objectifs fixes.
Ce que paient mes mariés, c’est aussi une probabilité de défaillance technique très diminuée, que je diminue encore par l’écriture des photos systématiquement sur 2 cartes, et 2 cartes de marque différente pour évier des modes communs de défaillance.
Un autre exemple de « everything is going wrong »: la gestion des pannes de matériel.

Un autre point de « everything is going wrong », et bien que cela ne soit pas obligatoire en France pour les photographes, j’ai une assurance de responsabilité civile professionnelle, y compris pour l’usage d’un drone. Coût: 1200€/an

Un dernier point illustrant « everything is going wrong »… Si je suis malade pour le jour de votre mariage, je fais partie d’un réseau de photographes où je peux espérer trouver un remplaçant au pied levé.

Enfin, avec a minima 16 heures le jour du mariage et 50 heures de tri et post-traitements des photos, je vous laisse calculer mon taux taux horaire, hors amortissement du matériel, hors assurances, hors frais de déplacements, hors frais de site Web et…hors charges sociales. En prenant tout en compte, je paie plus cher (avec plaisir) mon adorable femme de ménage.

L’existence de photographes amateurs pour les mariages a donc, de mon point de vue, créé une sorte de culture généralisée des prix où un photographe qui demande plus de 500€ pour un mariage est un fieffé voleur.

Et donc…

Les différences majeures, de mon point de vue entre un pro et un amateur pour les photos de mariage, c’est:

  1. la pratique, la prévision et le « être toujours au bon endroit au bon moment »
  2. un certain nombre d’assurances (matériel, accidents, indisponibilité)

Et comme pour toute forme d’assurance, ça casse les pieds de les payer, mais quand on a un pépin, on est finalement bien content de les avoir souscrites et payées!

2 réflexions au sujet de “Pro/Amateur”

  1. Je suis tout à fait d’accord avec ce que tu écris Thierry, à ceci près que ça ne me dérange absolument pas d’expliquer pourquoi je prends entre 1300€ et 2000€ pour un mariage 😉 D’ailleurs c’est ce que tu fais finalement au travers ce post, l’intérêt c’est que maintenant tu pourras leur envoyer lien :p
    L’autre différence avec toi, mais elle est presque hors propos, c’est que je travaille en Fuji (2 X-T2, 1 X-100F, et trois focales fixes seulement (j’en ai d’autres si besoin) : 16 mm (24mm eq. 24-36) f/1.4, 56mm (85mm eq. 24-36) f/1.2 et 90mm (135mm eq. 24-36) f/2. C’est beaucoup moins lourd est beaucoup moins cher ! Pour le reste je suis comme toi (j’imagine également que tu as un NAS et que tes données sont synchronisées dans le Cloud dans un espace chiffré ?).
    Dernier point : t’es certain que la RC Pro n’est pas obligatoire en France ? J’ai lu le contraire il me semble.

  2. Cela me fait vraiment très plaisir de te lire ici Pascal!! 🙂

    Oui, j’ai aussi écrit cet article pour ne pas avoir à re-expliquer une 101ème fois les tarifs à des personnes qui de toutes façons ne seront jamais clients!!

    Pour les objectifs, ne pas avoir à faire de recadrage en post-traitement donne un avantage aux zooms dont je ne pourrais plus me passer. Et ça va tellement vite en mariage que je ne suis pas capable d’avoir ce que je veux en cadrage avec des focales fixes. Et avec 2000 photos à livrer par mois en haute saison…
    Pour le prix, la différence n’est pas énorme quand on connait les bonnes adresses et qu’on n’accorde pas d’importance à la garantie locale 🙂
    Evidemment, tes ouvertures à 1.2 et 1.4 permettent de faire des choses plus artistiques qu’avec mes 2.8. Mais en mode « reportage », tu se sers beaucoup des ouvertures max?

    Pour la RC, non, je confirme qu’elle n’est pas légalement obligatoire en France pour les photographes. Elle y est obligatoire pour les professions réglementées: santé, droit, experts-comptables, agents immobiliers, agence de voyage, assurances.
    Mais pour pouvoir travailler en dehors de France, et avec un drone, de toutes façons…

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